Mots et couleurs

textes auto-biographiques anciens et actuels, poésie, chansons, contes et nouvelles

19 juillet 2005

19 juillet jardin

Ce matin, chère amie,

Drôle de papier dont je viens de retrouver une ramette. Très fin, papier avion, très doux au toucher, papier baiser.
Est-ce ce qu’on appelle du papier-pelure ? Mais pelure de quoi ? D’oignon, d’échalotte ou d’ail ? en tout cas fine pelure, pas pelure de pommes-de-terre. Pelure de bon temps à prendre avec toi. Bon toucher du matin calme.

Toucher. Retrouvé également dans le même placard une revue sur le thème d’un colloque à Montpellier en 1992. Je relis. J’ai tout oublié ou presque. Couplet habituel de l’écrivain qui refuse l’ordinateur ( j’en ai entendu un récemment à France-Inter) L’ordinateur qui prive de ratures, de froissé, de rage et de jouissances de toucher. Ce matin cette pelure d’oignon à ma préférence pour te toucher à distance. Pelure : caresse d’écriture. Papier : lettre à tendresse rapprochée. Ecriture à la main : pelure des mots protégeant la chair tendre.

Le jardin respire. Il a eu une sa ration d’eau cette nuit et hier. Juste en surface. Une caresse d’eau. Il en faudrait d’autres pour le pénétrer. En particulier pour ce que j’ai replanté il y une huitaine de jours : de minuscules gousses d’ail que j’avais récupérées sur la plante l’année dernière. C’était la première fois que je constatais que l’ail en tige qui fleurit reproduit ( en miniature) la même gousse que celle en terre. Une sorte de boule de ping-pong constituée d’une vingtaine de petits croissants de la grosseur d’un petit petit- pois. Et donc j’ai tenté l’aventure de les mettre en terre. Ce qui en bonne logique devrait me valoir une soixantaine de rejetons, peut-être cent, je n’ai pas compté. J’aime bien assister au cycle complet, du préambule à la conclusion, et que ce cycle passe par mes mains … je te tiendrais au courant à l’automne de l’expérience.

Les hortensias eux aussi sont ragaillardis. Ils pètent de santé contre le mur bas qui sépare la cour du jardin. T’en souviens-tu ? Mur moussu, couronné par ma collection de cailloux, également moussus pour certains. Le mur est là depuis plusieurs générations et je l’ai trouvé tel quel en rachetant La Loue mais les pierres du dessus je les ai posées pour me raconter mes anciennes promenades. La plus belle (des pierres, peut-être des promenades ! ) est rose et blanche, incrustée d’éclats scintillants. C’est mon fils qui l’avait charriée malgré sa taille et son poids jusqu’à la maison de location dans les Cévennes. Elle continue à me parler du courage et de l’attention de mon garçon adolescent.

Comment nourrir la confiance en la pluie ? « Il y toujours quelque chose qui fleurit et quelque chose qui se fane. Quel dommage, ma charmante beauté ( c’est des fleurs que je parle) quel dommage que le temps coule ! La beauté passe ; seul le jardinier demeure. Pour le jardinier l’automne commence en Mars lorsque se fane le premier perce-neige » Karel Capel (l’année du jardinier)
Encore des retrouvailles avec la pièce du fond et ses collections de mots et de papier. Je songe à reprendre « Le jardin de Danielle », textes et chansons pour cet hiver.

Une limace vient de s’aventurer sur le seuil pour me rappeler qu’un lendemain de pluie il y a autre chose à faire que d’écrire ou chanter, même des chansons jardinières. La malheureuse vient de payer d’un coup de pioche son avertissement. Je prends mes sabots et je file au jardin.

Retour. Touché la pioche, le râteau. Désherbé un peu partout. Entre les courges, courgettes (elles commencent à donner) Planté. Semé. Haricots, doucette. Tué quelques limaces. Mais la pioche découvre sous un demi-centimètre la terre sèche. C’est bien ce que je craignais. La pluie malgré l’orchestre du tonnerre tout autour n’a guère été efficace. Enfin c’est mieux que rien ! J’ai ramassé une poignée de petits pois et une de haricots, une tomate, la première ! Ton jardin du Sud doit être plus en avance que le mien.

Hernandez conclut abruptement sa conférence « L’ordinateur, c’est la défaite du Sud que j’aime tant ! » tandis que, tout en douceur, Capek le jardinier confie au jardin « Chaque année apporte davantage de croissance et de beauté. Dieu soit loué, nous aurons bientôt un an de plus. » Est-ce d’être à la fois jardinière du Sud sans ordinateur que tu m’envoies toujours tant de sujets d’espérance ?

1 commentaires:

Blogger Julie Kertesz - me - moi - jk a dit...

Toucher. J'aime aussi toucher. Mon journal, son couverture, son papier. Le crissement de stylo quand j'écris "en direct" c'est différent.

Ce qui est vrai, que je n'écris pas la même chose dans le journal que dans ma note journalier de blog, mais il n'y a pas de mieux ou moins bon, juste différent.

« Il y toujours quelque chose qui fleurit et quelque chose qui se fane." tu dis.

Hélas, je sens des fois que c'est moi qui me fane et d'autres qui fleurissent. Dans mon jardin c'est pas très important, mais dans ma vie, c'est autre chose.

mercredi, 20 juillet, 2005  

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