Mots et couleurs

textes auto-biographiques anciens et actuels, poésie, chansons, contes et nouvelles

28 novembre 2006

ELLES


Partie pour aller chercher le soleil à Villard, je me rassasie de ses premiers rayons sur les Grandes Roches St Michel. Au retour elles seront entièrement irradiées. C’est un hymne au soleil qui me vient au lèvres. Un grand « thank you God ! I love you. I believe ! Specially when you are so glorious. »
Mais je ne chante plus : c’est la mine de la poissonnière qui occupe mon esprit. Je lui ai acheté deux tranches de cabillaud, 560 g de moules. Je la remercie d’être là, vaillante derrière son étal ; dans ce village de montagne, ce n’est pas évident de trouver encore une poissonnerie. Alors la poissonnière, (qui n’a rien de vulgaire contrairement à ce qu’on l’habitude de dire) me raconte subitement la tristesse de sa vie. On va vendre la boutique. On n’en peut plus. Il n’y aura plus de poisson. Pensez qu’elle tient là depuis 25 ans. Elle travaille depuis l’âge de vingt ans, son mari depuis seize. Jamais de repos. Ils vont vendre, elle est malade, ils ne trouveront pas de repreneurs. Personne ne veut d’un tel travail. Les jeunes ne veulent plus « sortir les mains de leurs poches » …
Je lui trouvai en arrivant un teint, une silhouette de jeune fille. Je découvre dans ses propos une amertume, une lassitude de vieillarde.

La mercière a placé sur le trottoir ses présentoirs à chemises de nuit, à pyjamas. C’est l’un d’eux qui me tape dans l’œil. Je le crois soldé sur la foi d’une étiquette ambiguë et j’entre. Malgré le prix, j’achète le pyjama. La mercière est au travail derrière sa machine à coudre. Elle répare les vêtements, elle change les fermetures éclair … Ils se sont tout de même acheté une voiture neuve. APIS, le chien vient me flairer. « Oh ! Oh ! Dieu égyptien ! » La mercière est contente de cette reconnaissance qui fait de son chien un chien d’importance, contrairement à ceux des voisins, les Médors ordinaires. Et je suis informée aussitôt que, malgré la voiture neuve, son chien est là dans le magasin atelier comme tous les matins. Il a suffi de capitonner le siège arrière de vieux draps.
J’ai droit à une ristourne de 70 centimes. Elle ne solde jamais. Ah ça non ! Elle n’a pas, non plus, de pelote de laine dépareillée pour réparer mon gilet. Mais une ristourne pour arrondir mon compte, oui, pourquoi pas, à une dame qui connaît les dieux égyptiens et caresse les chiens.

Soleil,
Entre dans les cours et les arrière-cours des travailleurs, pénètre dans les modestes magasins d’artisans !
Réchauffe leur journée rude et empaquetée, d’un sourire de lumière, d’un petit rayon de légèreté !
****

(Au revoir pour une petite semaine. J'ai encore du soleil à glaner vers le sud. A bientôt, très chers ! Ne pleure pas Lucienne. tu sais que mes éclipses ne durent jamais longtemps !

0 commentaires:

Enregistrer un commentaire

Abonnement Publier les commentaires [Atom]

<< Accueil