Mots et couleurs

textes auto-biographiques anciens et actuels, poésie, chansons, contes et nouvelles

21 septembre 2007

AINSI VA ...


Ainsi va la vie qui va … c’est comme ça que j’avais nommé la rubrique de cet été pour les faits divers autour de moi. Mais quand le fait se rapproche, difficile d’en faire de la rubrique ou de la philosophie. Et pourtant c’est souvent avec des mots, du récit, du poème, que je cherche à sortir de la tristesse qui s’accroche à moi. Je ressens parfois un malaise, comme si le silence était le seul respect à accorder au malheur des autres ; ce n’est pourtant que lorsque j’ai pu exprimer cette douleur, cette injustice que j’ai un peu l’impression d’y avoir fait front.

« Injustice » c’est avec ce mot qu’une de mes voisines, après la cérémonie d’adieu à Rémi, pointe le poing vers les cieux. Je la rencontre à la boulangerie, nos larmes sont encore visibles. Le besoin de dire, de se prendre les mains, encore urgent. Oui, on aimerait accuser qui n’a pas de nom. On se sent, nous tous du quartier qui ne nous voyons pas forcément pendant des mois, qui ne nous sentons pas intéressés de près par la vie des autres, étrangement unis ce jour-là. Bien plus que par des fleurs déposées en notre nom. Je me retrouve le lendemain pour une visite au cimetière que d’autres voisins s’apprêtent à quitter. Cette tombe à même la terre sous ces rochers des trois pucelles qui s’élancent vers le ciel si bleu aujourd’hui, nous avons besoin d’en vérifier la place, son immobilité et son silence. Ils s’éloignent un peu et je risque un signe de croix, une prière. Sans savoir. Sans être sûre de rien. Parce que j’en ai besoin. Une paix me vient à réciter les formules depuis si longtemps dites par tant de cœurs en détresse ou en paix, avec toujours la même incertitude de la réponse. Je ne m’interroge pas sur le sexe des anges, sur la virginité improbable de qui fut mère. Je crois à quelque chose. Quelle que soit la distance à franchir c’est d’un appel dont j’ai l’ardent souci, pour Rémi, pour mes enfants, pour mes petits enfants qui ont joué avec lui, pour chacun des vivants afin qu’ils n’oublient pas de remercier quand il est encore temps. La mort a le pouvoir de rappeler la magnificence du don de la vie. Elle n’explique rien du mystère. Elle rend palpable le sens à accorder minutieusement, courageusement, attentivement, à chaque instant.
Rémi est ressuscité. Il vit maintenant dans quatre corps différents. Son cœur, ses reins, son foie. Les hommes sont parfois capables d’écouter les conseils des dieux. De concentrer leur formidable intelligence, leur maîtrise à servir.
Nous avons bu le café hier avec les parents, chez eux. A leur invitation. Un gâteau maison nous était servi sur la table. Et je l’ai trouvé très bon, très réussi. A ma question sur la difficulté d’accepter le prélèvement d’organes ils ont répondu que c’est eux qui l’avaient demandé quand ils eurent compris qu’aucuns soins ne pouvaient sauver leur beau garçon de 17 ans, en pleine forme avant l’angiome.
« Mais Maman la vie continue » j’ai dit à ma mère qui se rebiffait contre sa propre mort et les absences autour d’elle. Je m’en suis voulu de cette péroraison, je ne l’ai jamais oubliée. Et pourtant … oui ! la vie continue. Un compagnon du devoir ne rejoindra pas son tour de France mais le devoir, le tour, continuent.

Merci Julie. C’est ton commentaire qui, ce matin, deux jours après, me tient ici pour en parler encore.

2 commentaires:

Anonymous Anonyme a dit...

heureuse de te lire à nouveau Gelzy même si les derniers sujets ne sont guère gais mais c'est vrai quand même... et je suis bien placée pour le savoir actuellement même si c'est la vie, oh oui !!!

vendredi, 21 septembre, 2007  
Blogger David a dit...

ces moments tristes...

moi aussi, je risque le signe de croix...

samedi, 22 septembre, 2007  

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