Mots et couleurs

textes auto-biographiques anciens et actuels, poésie, chansons, contes et nouvelles

30 septembre 2008

LAISSE

Laisse dormir les mots dans leur sac de toile
Pyjama des douleurs, laisse-les prendre corps
Le temps perdu cliquète sur les cadrans encore
Laisse tes yeux partir au delà des étoiles …
Bah ! Quoi que tu tentes, quoi que tu fasses
Le jour se lèvera sans ta contribution
Qu’importe que la nuit ait noyé ta chanson
Une autre trouvera d’autres notes de basse

Et là, bien installée sur le palier des sons
Tu poseras ton rire sans rimes ni raisons
Tu laisseras aller ton chemin de traverse
jusqu’à la côte amie et la mer qui la berce …

27 septembre 2008

GRAIN DE SEL


Pleine de sel : de l'atelier d'écriture

Pleine de sel, la vague qui me roule ... Plein de sel, le pot où je plonge ma main, brun à La Loue, bleu à St Nizier. J'ai peint et offert un certain nombre de boîtes à sel mais pour moi je préfère les pots.
Pleine de sel la réflexion de la malade Alzeimer qui avait ce midi de fulgurants retours d'ironie.
Indispensable sel du pain. Sel de Guérande ou sel Cérébos, Gros sel ou sel fin : tout sel est l'additif indispensable à la nourriture.
Comment souscrire à la gabelle sans révolte inutile ? Je me souviens
avec tendresse du spectacle 1789 d'Ariane Mouchkine. On y assistait debout. A cette époque je n'avais pas mal aux jambes ! J'avais acheté le livret et, en classe, en fit répéter des scènes aux Troisièmes pour le spectacle 1989. Je les entends encore clamer "gabelle, gabelle". Pleine de sel j'étais, de ferveur pédagogique, d'ardeur révolutionnaire.
Sel de la vie à puiser sans cesse, à découvrir encore et encore. Marais salants. Ceux du Languedoc défilent sous mes yeux. Sète, Perpignan. le train entre en gare ….
Mines de sel de Pologne avec leurs statues pétrifiées comme les fantômes du communisme.
Et ce fameux grain de sel qui était à la fois attendu dans la soupe familiale et vilipendé. Mon père aimait mon esprit de sel que je tenais sans doute de lui, ma mère moins ! Elle m'aurait préférée douce et sucrée comme la mousse. Ma soeur aînée continue à me donner du " Ma gie en sucre" pour m'amadouer mais je ne proteste plus !
- As-tu mis le sel dans la soupe ? Bien sûr!

26 septembre 2008

NONOBSTANT

Il y a trop de temps coincé dans les serrures
Et des portes sans gonds qui battent dans le noir
Il y a trop de mots au bord de la blessure
Il y a trop de temps

Il n’y a pas assez au fond creux de l’horloge
De minutes à bénir, de souvenirs rieurs
Tout a passé si vite, si faible était la lyre
Il y a trop d’Ici et pas assez d’Ailleurs

J’ajuste sur ma face le masque indélébile
J’enlève une à une les plumes bariolées
Sur le miroir sans tain se fixe encore la trace
Des projets avortés, des désirs exaucés

Et pourtant … et pourtant … il y a bien quand même
Nonobstant la froidure
Aux lèvres de l’hiver un sourire qui pleure

Qui pleure de bonheur

25 septembre 2008

LES MONIQUES

Les Moniques

La première dans ma vie fut ma cousine rebaptisée La Mone … Ma cousine de LYON. Blonde ( les teintures), artiste (le piano), fille unique ( la veinarde !)
Nous chantions, elle me faisait chanter
« C’est un mauvais garçon qui a des façons pas très catholiques … »
« Mon p’tit cousin « : quand j’ai retrouvé dans une brocante la partition quel plaisir que de l’adapter à mes maigres talents pianistiques. Car, si, tardivement, j’ai appris le piano, c’est bien sûr pour mieux l’imiter et même, tout récemment, les mèches blondes ! n’est-ce pas …

Il en passa plus d’une, de Monique, sur les bancs de l’école. Une surtout fille de fille-mère comme on disait alors. J’ai beaucoup joué à la marelle avec elle et quand elle changea de nom sur les cahiers suite au mariage de sa mère je comprenais mal son changement d’identité …

Lundi, après un enterrement, j’ai fais la tournée de mes Moniques actuelles
- Monique 1 : je la connais depuis 20 années au moins … Son atelier est toujours ouvert. J’y suis allée pour raccourcir les manches du caban acheté au marché des associations. Elle eut vite fait de m’aider, de fournir matériaux et technique … Après les parlotes habituelles sur la situation sur l’ensemble du réseau, elle me fait écouter Félix. Félix Leclerc, québécois comme elle. Son frère vient de lui offrir le coffret consacré à sa vie. Ah Félix ! « moi, mes souliers » ! tu sais, celle-là aussi nous l’avons chantée aux journées du patrimoine … j’ai bricolé un petit texte de présentation. Je te le passerai.
J’emporte une drôle de boule en patchwork. Monique s’occupe d’une association en Afrique et ses travaux assurent en partie la trésorerie. Le patchwork de Monique ! J’aurais encore à raconter : ça viendra. L’atelier : un mur entier d’étagères à tissus, à fils, cachées par un patchwork en bandes verticales, bleu et vert … une splendeur ! Une longue table où travailler à plusieurs. Au plafond des mobiles, aux murs des tableaux de sa sœur …
Monique depuis l’exposition dentelles … oh la la !

Je termine la soirée chez Monique 2. Elle et moi nous n’avons que quatre de compagnonnage fidèle. Il nous arrive de nous tutoyer quelque fois. Elle vient de chiner dans les brocantes avec sa fille : pots, soupière, oiseau bleu, nappe, serviette à son chiffre, une adorable table à deux niveaux 19 ième peinte de fleurs … On décharge la voiture. on cherche la lampe qui convient à la table on trouve bien sûr … Peintures sur les meubles : table de salle à manger, portes du buffet dans le même réalisme à toucher du doigt tant les fleurs sentent bon, les fruits sont juteux … photos, peintures, objets … un hymne à la douceur de vivre, à la beauté du monde …
Je m’allonge sur le canapé. Une petite main cale les coussins, me borde d’un plaid moelleux. Bach s’élève. Des gouttes de pluie glissent sur ma joue
- qu’est-ce qu’il y a ?
- rien ! je suis heureuse
Elle s’éclipse pour préparer le repas.
Ce que je ne dis pas :
- Heureuse de te connaître
- Heureuse de me faire chouchouter dans ta maison sereine, de m’apaiser à ta paix
- Heureuse de savoir prendre à ton contact le moment présent où rien ne manque, où ma coquille a craquelé, où la vie est un papillon bleu qui se pose sur le bout de mon nez sans que je le dérange pour faire autre chose, ailleurs …

24 septembre 2008

BELLE DAME

« La belle dame du château
L’autre jour m’a dit « Mathurine … »
Je crois que c’est ma marraine ( 104 ans à ce jour !) qui m’apprit la chanson …
Je ne peux la reconstituer entièrement mais l’essentiel revient aisément. Je suis invitée au château, moi, petite (de taille et d’importance) et paysanne. Non pour y travailler, « faire la bonne » mais pour y dîner en noble compagnie, à cause, précise la chanson, de ma taille fine, la plus belle du hameau …
La plus belle : superlatif flatteur.
Cette chanson m’a permis, sans doute depuis l’enfance, d’oser me pousser à l’avant-scène. Oh j’y ai mis le temps mais enfin : je suis au château du Jalleriat, septembre 2008, journées du patrimoine.
La châtelaine fait visiter ce qui est encore montrable. L’âme têtue de cette vieille demeure quasi à l’abandon, l’âme qui clame qu’on peut encore sauver du passé ce qu’il a de meilleur, c’est elle : Danielle.
Elle a imaginé, inventé, réinventé, reconstitué, mis en tableaux photos anciennes, matériel photographique, lettres, cartes … Elle a nettoyé jusqu’aux vitres, taillé, replanté dans les vasques de l’orangerie pour donner l’illusion que la vie est revenue au château …
Elle raconte …
Elle s’est maquillée, habillée de la tête aux pieds en volants, voilettes …
C’est peu dire qu’elle anime le lieu : elle force chacun à ouvrir son entendement, ses yeux. Elle bouscule les petits conforts actuels, les aveuglements bien commodes …
Dans son sillage ceux de sa famille de cœur prennent ou reprennent du service. L’ancien menuisier, la veille de l’ouverture, mastique les vitres qu’il a fournies, oh de simples verres blancs en place des vitraux ! mais la bâtisse en sourit plus clairement. Où est passé le hibou de pierre du bassin ? Que sont devenues les cheminées en marbre ? Danielle interroge, fourgonne dans les non-dits, les allusions évasives pour traquer la vérité … Elle en appelle aux responsabilités communales … le bâtiment est propriété de la commune qui y entasse indifféremment les bulbes de fleurs, l’atelier des jeunes, un bric à braque hétéroclite utile ou inutile … Un homme qui s’est rendu dans le grenier me dit offusqué que « c’est une honte » …
La ferme du château a été transformée en logements, pardon en « habitations fermières ». On a gardé à peu près l’aspect extérieur d’origine.
Danielle, belle dame, servante obstinée du patrimoine,
« Je suis bien fière et bien contente
et chacun m’envie au hameau
car maintenant et je m’en vante
partout je peux dire bien haut … »

d’avoir été là, avec toi, pour te regarder, t’écouter, accompagner de nos flons-flons ce vent de mémoire que tu as fait souffler, cette petite brise d’espoir en un avenir qui tienne compte des acquis.
Il y a bien quarante années que nous cheminons ensemble dans ces allées du patrimoine. Je connais ta pugnacité, voire ton acharnement, au détriment parfois de ta santé. J’aime ta façon de faire de ce passé non pas « table rase » mais table garnie où chacun peut s’asseoir. Tu m’as soutenue, tant de fois dans mes rêves de résurrection.
Tes longues heures diurnes ou nocturnes pour « assurer » cette tâche en plus de l’ordinaire ( ton travail, ta famille), j’en mesure le prix.
Ces deux jours-là Belle Dame, au château je vous aimais ni plus ni moins que d’habitude mais, comme d’habitude, ça faisait drôlement du bien !

22 septembre 2008

RETROUVAILLES

Ma Ded,

Je n’arrivons point à dormir …
Je repensons à toute cette semaine, à tout ça : c’tanniversaire, ces fleurs gâteaux, ces deux petites bougies symboliques de ce gros paquet d’années à souffler …
Voilà c’est fait, c’est dépassé, c’est bien passé comme une lettre à la poste avant dénationalisation …
Et puis là, sur le bord de la nuit réveillée : toi !
Une envie de te toucher encore, de te bisouiller, d’entendre ton rire, ta voix …
« Non tu n’as pas changé ! » Je te le chante avec l’accent d’un clown dans un film ou à la télé … je ne me rappelle plus … Ah ! si ! peut-être Dario Moreno
J’ai des envies de faire le clown à perpétuité …
Deux inspirations contradictoires cette semaine :
1- repeindre l’inscription sur la tombe de ma sœur. Idem avec les plaques que j’ai charriées jusqu’à la maison pour les rafraîchir. En grattant les lettres en creux puis en les garnissant de doré, de blanc, en posant par ci par là des petites fleurs, je parlais avec elle mais c’était pas triste …
2- à Lyon, en passant devant une boutique pour fêtes j’ai demandé brusquement à Pierre de garer et je suis allée acheter en 5 sets la perruque rouge et le chapeau melon jaune qui accompagneront le nez rouge que Marie-Laure m’a offert. Je viens de les essayer devant la glace, j’ai ajouté le boa en plumes bleues, cadeau de Danielle … et « quelque chose » s’est profilé sur la glace. Un truc … qui s’appellera « La partie de scrabble » ou « La partie de crabe » je ne sais pas encore
Y a plus qu’à …Lettres blanches ou dorées, 7 lettres déjà tirées déjà ! 7, 70 … Tant de mots qui doivent pouvoir s’ajuster sur la nouvelle réglette à garnir …
Quel cadeau que tu sois réapparue après cinquante ans avec ce même rire, cette voix tonique et entraînante, les photos d’EN dans ton sac. Cette fille toute menue en haut de la photo de classe c’est moi ? et celle dans la rue qui marche en avant de moi, si belle, si élégante c’est toi que j’admire, que j’aime, qui me sert de phare …

A Lyon, avant-hier, mes deux petites filles de l’âge que j’avais alors. Je les regardais éberluée, si jolies, si fines, si fortes, si vivantes …
J’en reviens pas de toute cette histoire. Hier, aujourd’hui … 20 ans, 70 … un simple éclair …
Quel heureux hasard ( ?) que ces retrouvailles. Michèle, une de tes amies qui rencontre Pierre D. un de mes miens , une conversation qui fait inopinément le lien entre nous deux …
Je frissonne un peu … J’ai posé le nez rouge. Si je ne veux pas que celui d’origine se congèle je vais aller me flanquer sous la couette …
Hier, pour terminer notre prestation à l’orgue, Pierre et moi avons entonné « Quand on n’a que l’amour ». J’ai forcé la note : je me sentais si convaincue !
« Alors sans avoir rien que la force d’aimer
nous aurons dans nos mains
Amie, le monde entier ! »

21 septembre 2008

DE COMPOSTELLE ...

Tu m’as dit si souvent je t’aime
Que c’est descendu dans mes pieds
Et je marche sur le chemin
Allègre comme un pèlerin
De Compostelle

Tu m’as dit si souvent je t’aime
Que j’ai pris envie de chanter
Dans mes cheveux y a des poèmes
Qui n’arrêtent pas de friser
En ritournelle

Tu me l’a dit en plusieurs langues
Inconnues dans les dictionnaires
Et quand je vais tout de travers
C’est ce souvenir qui me plante
Sur la planète

Je ne sais pas pourquoi tu m’aimes
Si c’est pour la marche ou le chant
Ou peut-être pour quelques phonèmes
Qui parcourent mes yeux et mon sang
Et mes dentelles

Donc à tout prendre et réfléchir
Je ne pose plus la question
C’est ton « je t’aime » que je respire
Et qui entretient la chanson
De Compostelle

19 septembre 2008

UNE JOURNEE

Une journée comme la dernière
à se reposer la cervelle
sur des souvenirs apaisés
à faire marcher vieilles guiboles
d’un pas souple, élégant, tout comme
jeune pouliche dans le pré

Et puis pour conclure et reprendre
agrafer aux murs de la chambre
en plein hiver ou au printemps
ces mots de neige et pacotille
de cailloux roses et de brindilles
qui virevoltent et s’émoustillent
comme papillons dans le vent

*mais une journée aux châteaux
(récit différé jusqu'à Lundi)

TU Te laisses faire ...

Tu te laisses faire
Tu laisses les livres te lire
Tu laisses la lune te suivre
Tu changes rien, tu veux rien changer
C’est bien ! tu te dis
Tout est bien qui finit bien
Tout a bien commencé
Tu bailles. Tu as sommeil. Tu dors.
Toi aussi tu bois la tisane comme toutes tes tisanières ancestrales
T’entends la pendule qui cliquette les minutes. Ça aussi tu aimes. Le silence souligné tic tac, le sur-titrage du temps posé en équilibre.
Un casse-croûte au temps qui tient la route
Toi aussi tu tiens à la route. Telle qu’elle est. Le petiot chemin qui sent la noisette. Tu te baisses. Tu ramasses.
Bref ! tu te dis
En sopuvenir.
Tu en rajoutes
Bref de bref ! c’est bien. C’est bien bien. C’est bonbon.
T’as même plus peur que ça s’arrête.
T’as même plus peur
Presque …

17 septembre 2008

LES ETOILES

Heureusement il y a les étoiles !
Trop belles les étoiles pour les attraper avec du fil friable, cassant, du fil coton, du fil de soi … Mieux vaut les laisser se ficher en l’air, se ficher de tout ce qui n’est pas elles …
Les regarder par la porte ouverte sur le ciel
Les regarder encore quand la porte se ferme
Se fermer comme la porte. Comme une huître.
Bien close les regarder encore avec l’œil intérieur, celui qui ne se ferme jamais
Faire confiance au souvenir des étoiles inscrit dans la vision intérieure …
Les regarder briller doucement, indépendantes
Sacrées étoiles ! Garde à vous ! Gardez-vous bien si haut, si loin, hors de la mêlée …
Etoiles gare à vous ! Veillez sur votre long silence !

16 septembre 2008

MOI !

Pour éviter que ne se noient
Dans la nuit étrange et sans voix
Ces mots échappés de leur cage
Ces mots bancals et de guingois
Je dois attacher sur le toit
La lune et son regard qui penche
Vers moi

MOI trois lettres qui recomposent
Une humble et fragile unité
Moi Mirage
mOi Oblongue nouveauté
moi Irréelle et froide clarté

Moi Mystère et Moi Merveille
Odeur forte sous les aisselles
Iris perdu quand vient l’été
Recomposé dans les prunelles
Quand il regarde vers le ciel
Un peu plus haut, un peu plus loin
Un peu plus bas que le chemin
Un peu plus que le bout du nez

15 septembre 2008

BIEN SAVOIR, dit-elle

Je voudrais bien savoir, dit-elle
Mais elle se tut, découragée.
Quoiqu’à l’écrire, la question
comme les hirondelles
sur le fil, à l’automne,
risquait de s’envoler …

Ouf ! Plus de question !
La simple acceptation du fil et de la toise
L’allégresse –qui sait- d’avoir encore vingt ans
dans son entendement, la pauvre raison claire
de vivre sans raisons …
Mais « Pourquoi » reprenait sans cesse dan sa tête
Pourquoi brouillait les pistes
Pourquoi grinçait des dents
« la navigation sereine sème
sur l’altitude un dédain souverain »
Da ! Belle citation !
Sortie de quel abimes ?
Adaptée à quelles circonstances ?
A prendre ou à laisser ?

« Je prends ! » dit-elle
- se fit une tisane
- massa l’épaule du bon côté

14 septembre 2008

MAJUSCULE

Je ne comprends toujours pas mieux
qui je suis et qui j’ai pu être
Mais à la pointe de la nuit
dans mes veines et dans mes artères
probablement il y a Lui

Lui, interrogation majuscule
m’interpelle sur le chemin
Oh pas grand chose, un petit rien
Un brin d’herbe, un chou, une rose !

Je me sens tenu de répondre

Sans humilité, sans réserves

Ah ! laisse-moi bailler un peu
comme l’on baye aux corneilles
comme le vin va à la treille
comme l’eau qui emplit mes yeux

Oui ! j’ai un foie, j’ai une rate
J’ai une épaule et un genou
Je te dois tout : la lune plate
le soleil rond, le hâle aux joues
Et ces enfants que j’ai portés
comme la flamme à son soufflet

Attends pourtant que matin vienne
pour matines encore te chanter
Laisse-moi dormir dans le pré
de mes amours incertaines
Laisse-moi encore m’ébrouer
dans l’édredon des longues peines
Et rêver encore, ô rêver
longuement, en petite vieille
qu’on vient tout juste d’accoucher …

Dieu se tait. Je range ma plume
Dans le tiroir range mes gants
et une main nue sur mes flancs
se fait soudain toute câline ….

13 septembre 2008

MEGAMANDALA

J’aimerais bien descendre
Jusqu’au cœur de mon ventre
Au centre du cratère
Sans peur et sans reproche
Sans la moindre anicroche
Remonter vers l’hiver
L’hiver de mes artères
Accepter qu’elles se bouchent
Moi pauvre sainte Nitouche
Moi Reine de Saba
Sans rires et sans larmes
Partir avec la flamme
Qui me chauffa en bas
Et ronde et circulaire
Laisser filer la sphère
De ce tout petit point
Dans cet immense gouffre
Rejoindre le grand souffle
Et puis en rester là

12 septembre 2008

je ne sais pas mais

Ce malaise, cette tristesse
Comment leur tordre encore le cou
Jusqu’à ce qu’ils en meurent
Jusqu’à ce qu’ils en crèvent
Et ces poissons noyés
Et ces oiseaux sans ailes
Comment les remettre à l’eau
A l’air, au vent et à la brume
Jusqu’à ce qu’ils éclatent
De rire et repartent
Les poissons dans les cieux
Les oiseaux dans la mer
Nagent, volent, obtempèrent
A la navigation fluide entre deux hémisphères

Je ne sais pas mais il me semble
Que l’imposture alors serait démaquillée
Et que nous souririons ensemble
Des mots morts sur papier glacé

11 septembre 2008

MICROKINE

Proclamation dans la salle d’attente « Le corps humain est conçu pour s’adapter, se défendre, et s’autocorriger en cas d’agressions traumatiques, émotionnelles, toxiques, virales, microbiennes ou d’environnement /…/»

1- 9H Avant : j’attends
Les doigts dans l’nez
j’suis arrivée au Bon Parking
La Picasso me serre de près
Bleue comme le ciel
C’est bien ici : le Manhattan
1er étage Non c’est plus haut
je redescends mais j’ai bien l’temps
1H d’avance pour Maigneteau
J’sors mon carnet
Ah si j’pouvais dormir un peu !
Bleue comme le ciel
Pourvu qu’la Picasso s’en aille
Avant que j’parte !
J’ai peur pour elle
Et pour sa carrosserie toute neuve
J’auto-corrige

2- 11H APRES : j’attends
que Pierre revienne me chercher. Ça va bien ; Plus d’souci pour la voiture. Il se débrouillera bien pour la sortir de la passe dangereuse

Une femme dans la salle d’attente venue pour consulter, elle s’explique, elle m’explique : le calcium manquant à la mère, l’arthrite, l’arthrose … Elle est kiné. Me file de bonnes adresses : massages, radiesthésiste …
L’énergie … les Chinois ( elle part en Chine dans trois semaines)
- euh … vous … une praticienne … Vous y croyez ?
- Tendez votre main !
Je tends la gauche, elle place ses deux mains au dessus et au dessous de la mienne. Instantanément je ressens un flux de chaleur étonnant, puis une émotion qui monte, je me mets à pleurer …
Je tends la droite. Rien d’extraordinaire.

Le côté du cœur dit-elle … Protégez-vous … on est seul …

La Picasso n’avait pas bougé de place mais à l’avant de la nôtre un grand espace sans problème où dégager.

10 septembre 2008

FATRASIES


Fatrasies

Comment du fatras initial
Faire une fatrasie finale
Qui ait quelque peu d’élégance ?

Comment chaque matin renaître à la lumière
Fastoche pour le jardin
Dur-dur pour les artères

Soleil éclaboussé
Bellâtre qui s’ignore
Un pied sur le sentier
Un autre sur l’aurore
Accélérant des quatre fers
C’est la mob à Durant
Qui s’prend pour Lucifer

fatrasser : s’occuper à des niaiseries
fatrasserie : recueil de fatras et inutilités
fatrasies XIII e S Jehan Bodel d’Arras, Philippe de Beaumanoir, anonyme … : méli mélo fou
ex : Je sais le roman d’hélène
de bout en bout
j’ai une douleur à la tête
qui m’a tué aujourd’hui

fatrassière : blogueuse du matin chagrin
* retour à la campagne profonde déconnectée. Au revoir !

les heures, les heures, les heures ...


Quel chagrin ! quel ennui
De compter toute la nuit
Les heures, les heures, les heures.

De moment en moment
Réveillant la Saint-Mexant,
Pour dire, pour dire, pour dire :

Le genou, le jarret
La main gauche, le poignet,
L’épaule, l’épaule, l’épaule.

De remède en sait-on ?
Je tiens tout onguent miton
Mitaine, mitaine, mitaine ;

Coulange ( XVII e siècle)
Et cela se chante !

09 septembre 2008

VISION PRECISE



( proposition de l'atelier d'écriture)
Pour avoir une vision précise de la question, n'importe quelle question, il me faut des lunettes.
Retrouver d'abord les lunettes du réveil, celles qui ont plutôt tendance à bleuir les ciels et les choses à mon goût. En cours de journée il me faut respirer largement " Voyons ! Voyons ! " et la vision vient, généralement avisée.
J'évite cependant d'aborder les questions insolubles : Dieu, la planète, la pérennité des sentiments, surtout les sentiments maternels ou filiaux. Philomène, dit-on, était l'aveugle qui voyait clair dans les ténèbres et dans les familles. Mais elle n'était que ma cousine et j'ignorais sa prescience. Je ne l'ai pas interrogée à temps sur ses méthodes.
Il me reste les livres quand j'ai perdu les lunettes appropriées. A chaque découverte d'une écriture lumineuse je reprends espoir de terminer, grâce à eux, en pleine clarté.



J'ai rencontré cette année une jeune aveugle prénommée cruellement Aurore par ses parents avant que la maladie de dégénérescence n'ait abouti à complète cécité. Je peux affirmer qu'Aurore m'a donné à voir, que nos conversations, nos touchers des doigts et de l'âme, m'ont ouvert des horizons clairs et précis. Je l'ai accompagnée parfois à son exposition. Oui ! Aurore dessine de mémoire et sculpte. Ses créations ont la grâce de l'enfant et l'autorité du sage. Elle s'est mariée avec un archéologue qui ne fut pas effaré de pareille stagiaire. Elle aura un enfant s’ils peuvent. Elle a fondé une association. Elle voit clair.

08 septembre 2008

GAZOUILLIS



GAZOUILLIS
Ici Trouvé hier au soir ce passage de moineau
"Heureuse de faire ta connaissance par l'intermédiaire de Gazou!
Passer d'un gazouillis à un autre, c'est du soleil par ce dimanche tout gris!
Bottée, encapuchonnée, je me glisse à travers les sentiers pour découvrir les oiseaux aujourd'hui silencieux...
Trop âgée pour chanter ou jardiner, il reste l'émerveillement, Dieu soit loué!"

J'en ai ressenti un frisson d’aile. J'ai vu cette Suzanne comme à côté de moi,
( que j'avais d'abord prise pour une autre Suzanne connue ; Tiens ! qu'est-ce qu'elle devient ? il faudra que ...)
encapuchonnée, qui allait d’un bon pas, adapté à son âge volontaire et heureux, dialoguer avec les oiseaux, ramasser une feuille, un caillou … une minute de joie … la redonner au paysage, l’amplifier en éternité de vie.
J’ai ri du jeu de mots, étonnée de ne pas l’avoir trouvé plus tôt ( je me contente in petto d’appeler Gazou : Belle-Gazou comme la fille de Colette)

GAZOUILLIS 1552 RONSARD, Syn de Gazouillement : bruit léger et doux ,
oiseaux, eaux, enfants … le Dico devrait ajouter « blogueuses de tout et de tous âges. »

Tombée hier encore sur un livre ancien qui m’avait été offert et que j’avais méprisé jusque là « LA CHANSON FRANçAISE DU XV AU XX siècle. Il s’ouvre sur « L’amour de moi »
« Hélas ! il n’est si douce chose
que ce doux rossignolet
qui chante au soir, au matinet
quand il est las il se repose »
Muni d’un » appendice musical »( oh le joli gazouillis des mots surannés) je scanne la musique et l’essaie au piano. Le XV siècle ! C’était hier !

Gazouillis donc du matin au soir. Je suis allée voir Olga. Je la surprends en plein travail. Les curistes arrivent ce soir, la pension de famille les accueillera avec la soupe qui sent déjà bon et mijote … Deux viennent d’arriver. Qu’importe ! Olga n’est jamais à court de gazouillis léger pour prendre ce qui vient, la visite non annoncée, les clients nouveaux. Je la retrouve telle qu’en elle-même … j’adore entendre sa voix gazouiller avec l’accent portugais. Autour de la sangria, une fois montées les valises, elle évoque nos gazouillis de l’an dernier avec l’orgue, sort les photos. Elle dresse de moi un portrait si musical que j’en suis ragaillardie. Sans réfléchir j’embrasse en partant celui qui vient de nous rejoindre. Il n’a pas l’air mécontent de cette familiarité. Je lui glisse en partant « Soignez-la bien ! il n’y en a qu’une comme ça !"
Contamination des oiseaux.
Et des fleurs !
« Je la regardai une pose :
Elle était blanche comme lait
Et douce comme un agnelet
Vermeillette comme une ro o o o o o se ! »
Dieu soit loué !

07 septembre 2008

BIEN L'BONJOUR !


Comment chaque matin reprendre l’espérance
Bien l’bonjour !
A l’anémone du Japon le sourire hésitant
la tige un peu qui penche
le bourgeon balbutiant
mais qui fleurit quand même !
Aux quelques mots venus aux pourtours des oreilles
les syllabes têtues
les consonnes clairon
Bien l’bonjour !
Au souvenir d’hier la sève de la veille
Aux notes du piano le murmure de la terre en dessous du plancher

La question n’est pas là
Elle est dedans les gouttes d’une tasse de thé disponibles une à une
La boire avec délice en la laissant couler doucement dans les os

Bien l’bonjour !

06 septembre 2008

JOIE DE MOINEAU


La leçon du moineau de Sylvie Germain
"La joie nue d'habiter la terre et le ciel,de se baigner dans les flaques de pluie et celles de soleil,de flotter au gré du vent,de fréquenter les arbres et les broussailles qui lui sont autant de forêts profondes et d'abris enchantés.
La joie pure d'être en vie,libre de toute attache,sans souci du lendemain;et pourtant,les lendemains sont souvent rudes en hiver.Sans souci de lui-même et du regard des autres.Il se contente d'être en harmonie avec le monde. Ce n'est rien et cependant,c'est une immense leçon que prodigue le moineau : comment transfigurer sa pauvreté en fête,sa vulnérabilité en grâce."
Sylvie Germain (Songes du temps

Je retranscris la leçon, elle-même transmise par Gazou. Beau soleil matinal. ADSL à disposition. Ce matin je l’ai entendu l’oiseau bleu, l’oiseau joyeux. L’oiseau aux cinq voyelles pépiantes. Cette nuit il se taisait ou du moins je ne l’entendais pas. Pour sortir de ma tête je me suis levée. J’ai jeté sur le papier quelques mots antidotes au poison de la nuit noire.
2H30 :
j’suis perdue dans ma cervelle
y a trop d’mots, y a trop d’ruelles
que j’y tournicote en rond
Si au moins j’retrouvais l’fil
de chanvre, de soie, de nombril
j’retrouverais mon paillasson

A trop casser des cailloux
on perd le sens des bisous

Des trois blogs consultés Julie, Gazou, Solange du Québec que je découvre par l’intermédiaire de Julie, je prends la joie pure d’habiter la terre et je la replante au jardin d’écriture. Merci les filles ! Bisous ! gros becs ! Comptez sur moi pour les cui cui !