Mots et couleurs

textes auto-biographiques anciens et actuels, poésie, chansons, contes et nouvelles

23 février 2011

c'est pas rien 2


Va chercher ! Va chercher !
De l’eau au Rhône avec ton panier ...
C’est presque naturellement, de lui-même, que le premier cahier de chansons est venu se loger dans mes mains ce matin
- et ça, c’est pas rien, hein ma Gie ?
C’est pas rien ce qu’on fait toutes les deux !

Non ! Maman, c’est pas rien de remplir toutes ses journées de tant de travail ; c’est pas rien de faire à manger tous les jours sans en négliger un seul ; c’est pas rien une tartine de ton beurre du lait de tes vaches, recouverte de chocolat râpé ! Du pain de ta moisson et du Papa !
Et c’est même drôlement bon !
C’est pas rien de traire les bêtes matin et soir, l’hiver les engelures aux mains font si mal, et ces moments à la cuisine où les mains viennent se réchauffer dans l’eau chaude cuisent à en hurler mais on ne peut travailler avec des mains gelées ou dans des mitaines, et le froid mord si fort ...
C’est pas rien d’aller de l’avant avec un corps qui renâcle, qui s’épuise, qui n’aspire qu’au repos mais qui, vaille que vaille, ira encore au boulot parce qu’il est dirigé par un esprit de commandant, de général des armées de terre ...
C’est pas rien de s’extasier à chaque naissance, de regarder sa fille comme si elle était la Sainte Vierge et même son gendre, ce brave homme, comme s’il avait été pour quelque chose dans l’avènement du divin enfant ...
C’est pas rien de s’occuper d’un petit-fils, puis d’un autre avant de repartir à l’écurie ou au jardin, de leur préparer un bon petit-déjeuner, de les laisser dormir tout leur saoûl alors qu’il y a tant d’ouvrage qui attend et qu’ils pourraient d’ailleurs en faire leur part ces grands dadais, ces gognans mais les temps ont changé, les gones ne travaillent plus maintenant ... On n’ose plus rien leur demander...
C’est pas rien de regarder tomber la pluie en profitant de l’accalmie de travail au dehors pour rehanter une paire de bas, de mettre une pièce à un vieux drap avec couture, anglaise ou rabattue je ne sais plus faire la différence, mais j’ai reconnu les coutures, son aiguille, sa main, lors du grand nettoyage de placard d’après sa mort ; un drap de plus dans l’armoire, ça peut toujours servir, même aux enfants devenus vieux qui n’ont pourtant plus de souci à se faire pour se payer des draps de dessus, de dessous ... Il paraît même qu’on n’en met plus ! Des couettes, ils disent ! Ah ! les temps changent ...
Servir, servir à table, servir à vie, servir la vie ... Servir son homme, servir ses enfants, ses petits-enfants comme on avait servi ses grands-parents ...
Sans se raconter des histoires pour faire plus joli, sans faire la bobe, la bobèche, sans se raconter des daraisons, des niaiseries ... Sans gnusseyer, perdre son temps
Non par humilité, mais par générosité pure et simple

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